
On aurait préféré le vote de la censure immédiatement, car on peut craindre que le gouvernement manœuvre de telle façon que les avancées, notamment sur la suspension de la loi sur les retraites ou prochainement sur la taxe Zucman, soient effacées, si la loi de finances tarde pour être adoptée, les amendements ne seront pas pris en compte et c’est le texte initial qui pourra être adopté par ordonnance ou qui laissera la place à une loi de finance spéciale qui ne changera rien. Malheureusement c’est le gouvernement qui a la priorité sur le fonctionnement de l’Assemblée nationale, on est loin d’un régime parlementaire équilibré entre exécutif et législatif.
Tout le monde politique s’accorde à considérer que Sébastien Lecornu est le représentant direct de Macron et ce qui s’est passé lors de l’exposé de politique générale de mardi par le Premier ministre a montré que Macron avait très peur de la dissolution, d’où le ciselage des propositions pour que le PS ne censure pas immédiatement le gouvernement : suspension immédiate et totale de la réforme des retraites, pas d’utilisation de l’article 49-3 de la Constitution et des mesures fiscales plus justes notamment concernant les hauts revenus. Les deux premières demandes étaient claires et précises, la troisième beaucoup moins. Sur cette dernière Lecornu a été discret et ce qui est dans sa proposition de budget est assez ridicule.
La suspension de la réforme des retraites, si elle est réellement actée, est une décision positive pour 3,5 millions de personnes qui seraient parties à la retraite à partir de maintenant jusqu’au 1er janvier 2028 mais qui auraient dû attendre avec la nouvelle loi. Et cela ne coûte pas très cher au budget, 400 millions en 2026 et 1,8 milliards en 2027.
Le Premier ministre a décidé de laisser l’Assemblée nationale voter les textes, il faut s’assurer qu’il ne fera pas appel à la Commission mixte paritaire pour trancher les désaccords entre les deux chambres puisqu’elle est dominée par la droite et le Sénat. Il faut que ce soit l’Assemblée qui décide en dernier ressort, or le Premier ministre a seulement dit : « Sans 49-3, sans majorité absolue, le Parlement aura le dernier mot » c’est-à-dire y compris le Sénat. Si le Premier ministre n’accepte pas que ce soit l’Assemblée qui aura le dernier mot, il faudra censurer.
C’est à la gauche de décider ce qui doit être inscrit dans le budget comme recettes issues de mesures fiscales sur les plus riches afin à la fois diminuer le déficit et sauver les services publics essentiels et ne pas asphyxier les collectivités locales.
En février 2025, lors de la discussion du budget 2025 après la censure du gouvernement Barnier et la loi de finance spéciale, une majorité de l’Assemblée nationale avaient voté la taxe Zucman, mais le Sénat l’avait ensuite bloqué. Maintenant toute la gauche doit travailler sur les recettes du budget en faisant des propositions sérieuses pour enfin rendre la fiscalité plus juste et plus efficace.
Si une majorité de l’assemblée le refuse, il faudra aller à la censure et à la dissolution. Si l’Assemblée l’accepte, le Sénat fera une contre-proposition, le gouvernement devra alors donner le dernier mot à l’Assemblée nationale et selon le résultat il y aura ou non censure.
Il reste à la gauche, à toute la gauche de manœuvrer habilement et permettre l’adoption d’une loi de finance qu’elle aurait proposé si Macron avait nommé Lucie Castets comme Première ministre après la dissolution.
Un projet de budget 2026 inquiétant concernant la politique du logement et aussi pour les collectivités locales, le président du Comité des finances locales (CFL) a déclaré que les ponctions sur les collectivités s’élèvent, non à 4,6 milliards mais à 8 milliards d’euros. Des coupes inscrites au projet de budget, qui ne sont pas prises en compte par le gouvernement dans son calcul, impacteraient fortement les collectivités. Le président du CFL cite la réduction des crédits du fonds vert (« -500 millions d’euros »), la baisse des moyens alloués aux agences de l’eau (« -900 millions » d’euros) et à l’Agence nationale de l’habitat (« -700 millions » d’euros). En outre, l’élu prend en compte la hausse de trois points des cotisations dues par les employeurs territoriaux au régime de retraites des fonctionnaires territoriaux (« + 1,4 milliard » d’euros).
Pour tout savoir sur le projet de budget 2026 voir ici.